≪ L'histoire de Lotus Notes ≫

AIKIS Support
Par Laurent Bodhaine - SIKIA - Mai 2016

Introduction

Lorsque SIKIA a été fondée, les systèmes collaboratifs étaient encore peu utilisés. Les messageries étaient déployées depuis peu, les applications à interfaces Web étaient très rares et l’on entendait, encore, des phrases telles que « Internet ? Ça ne marchera jamais ! ».

SIKIA a été bâtie sur une vision et un savoir-faire largement basés sur les technologies Lotus. A cette période, non seulement le produit en lui-même mais sa conception, ses axes stratégiques et la vision qu’il donne au futur en font quelque chose d’unique, d’extraordinaire. Il inaugure les systèmes qui font l’Internet d’aujourd’hui, tels que les moteurs de recherche ultra-performants, la gestion de la connaissance en remplacement de la gestion des documents (Lotus Discovery Server) ou encore des annuaires avancés qui pouvaient ressembler étrangement à un Facebook d’aujourd’hui. « Que l’on puisse enregistrer mes préférences, mes centres d’intérêts, analyser mes publications et en déduire mon savoir-faire : scandale !! Que l’on puisse savoir où je suis et me contacter n’importe où : inadmissible !! ». Le public n’était pas encore prêt à cela. Pourtant, certains produits Lotus le permettaient, mais la plupart furent retirés si tôt présentés suite à des réactions indignées.

Aujourd’hui tout cela semble très loin, les usages ont évolué à un point et à une vitesse que peu de personnes pouvaient imaginer.

Lotus Notes et Domino ont fait leur chemin, nous avons réalisés des centaines d’applications sur ces systèmes, passé des jours et des nuits à coder des applications, à mettre en place des architectures, avec toujours un réel plaisir. Aujourd’hui, IBM Lotus n’est plus à la mode, et c’est bien dommage. Les derniers systèmes, pourtant robustes et performants, sont peu à peu remplacés. Nous continuons à en maintenir de nombreux, et nous continuerons autant que possible.

Pour tous ceux qui, comme certains de nous, ont aimé ce produit et y ont consacré une partie de leur vie, voici son histoire, pour lui rendre hommage. L’histoire d’un produit créé par des visionnaires dont l’un d’eux disait, regardant le chemin parcouru : « C'était excentrique de penser à un logiciel de communication de groupe en 1984, quand la plupart des gens n'avait jamais vu un système de mail... Le produit était vraiment très loin de son temps. » (Tom Diaz, premier vice-président d’IRIS ASSOCIATES).

L’origine

A la fin de la seconde guerre mondiale, le gouvernement américain doit reconstruire son système d’enseignement. Principalement délivré par l’armée, l’enseignement supérieur ne concerne qu’une minorité de la population. Au début des années 1950, un nombre croissant de nouveaux étudiants cherche à accéder à l’enseignement. Les infrastructures en place sont hélas insuffisantes pour répondre aux besoins.

Pour améliorer la productivité dans les usines, des chaines automatisées étaient apparues. Vient alors une idée : se baser sur cette automatisation de tâches pour améliorer les capacités d’enseignement.

C’est ce que suggère le physicien Calmer Sherwin en 1959. Scientifiques de tous horizons se mettent à la tâche : mathématiciens, physiciens, psychologues, professeurs et directeurs d’universités. Des centaines d’heures passées à penser un nouveau concept, à explorer, à diverger, sans jamais aboutir à une synthèse satisfaisante. Le projet est au bord de l’échec lorsque Donald Bitzer, alors assistant sur le projet, propose de construire un premier prototype, qui serait certes imparfait, mais qui permettrai de constituer une première base.

Entre 1960 et 1961, il va ainsi concevoir PLATO.

PLATO

PLATO (Programmed Logic for Automatic Teaching Operations), se heurte à une difficulté majeure : il n’a que très peu de moyens de restitution : pas de terminaux graphiques satisfaisants, pas de claviers adaptés, pas de périphériques performants. La première version du système, PLATO I, regroupe un ordinateur ILLIAC I (inventé en 1952 par l’université de l’Illinois) auquel sont reliés un téléviseur et un clavier permettant de naviguer dans des les menus. En 1961 une seconde version est élaborée, PLATO II, qui permet de relier en même temps 2 utilisateurs.

En 1963, PLATO est repensé sur les bases des premiers prototypes et de longues années de recherches commencent. En 1967 est conçu pour PLATO un langage de développement propre, le « PLATO Author Language », aussi appelé TUTOR, mis au point par Paul Tenczar.

CERL

Le projet convainc de plus en plus : alors que les financements émanaient essentiellement de l’armée, la communauté scientifique décide, à partir de 1967, de soutenir le projet à son tour. La National Science Foundation (NSF), accorde des fonds réguliers et permet la mise en place du CERL (Computer-based Education Research Laboratory), sous la direction de Donald Bitzer.

En 1969, le nouveau système, PLATO III, est enfin présenté. Bien plus performant et abouti, il est alors capable de faire fonctionner simultanément 20 terminaux.

Donald Blitzer et son écran plasma pour PLATO

Donald Blitzer et son écran plasma pour PLATO

Les nouveaux moyens en place permettent de belles avancées. PLATO IV apparaît en 1972, doté d’évolutions majeures. Il comporte notamment un écran plasma orange capable d’afficher des images de 512x512 points et une grille de 16x16 points, formant une sorte d’écran tactile, permettant aux étudiants d’interagir avec le système. Il s’améliore de manière continue, il peut se connecter à des périphériques lui offrant de nouvelles capacités, telles que la possibilité d’émettre du son.

CDC

PLATO IV, qui est un succès, suscite l’intérêt de William Norris, un des fondateurs de la CDC (Control Data Corporation). CDC est une entreprise américaine pionnière dans la fabrication de supercalculateurs, qui cherche à se diversifier et voit dans PLATO réunis tous les ingrédients d’un projet réussi : un ensemble de technologies complémentaires, un marché porteur et un concept basé sur le recul des inégalités face à l’enseignement. En 1976, CDC acquiert les droits commerciaux de PLATO et une équipe PLATO-TUTOR réalise des applications qui vont permettre l’étude de langues en ligne et connaître un véritable succès.

PLATO évolue, se dote d’une fonctionnalité de messagerie instantanée et est porté à grand renfort de publicité par William Norris. Contre vents et marrées il ne cesse de promouvoir son système

d’enseignement assisté par ordinateur. Il met en place des concepts innovants pour en faire un système consommé massivement, mais les revenus ne sont pas suffisants. Trop cher, pas assez attractif, le système peine à se démocratiser. En 1986 Norris déclare forfait et démissionne de CDC. PLATO débute alors une mort lente.

Même s’il a été conçu pour l’enseignement, PLATO était cependant bien plus riche qu’il ne le laissait entendre. En 1973, David R. Woolley y avait inclus PLATO Notes, un système de discussion en ligne permettant de tenir des conversations sous forme de messages postés ; en d’autres mots : un forum. En 1976, PLATO comportait également un système de courriers électroniques, de messagerie instantanées, de partage d’écran à distance et même la capacité de faire fonctionner des jeux en ligne.

IRIS

Dans l’équipe du CERL un jeune étudiant, Ray Ozène, travaille sur PLATO Notes. Après avoir obtenu son diplôme en 1979, il débute une carrière chez Data General Corporation. Dans le même temps, il travaille indépendamment sur le développement d’un produit basé sur PLATO Notes mais destiné au PC. Malgré ses efforts, il se heurte à la réalité économique et personne n’accepte de financer son idée. Personne, sauf Mitchell Kapoor, qui cofonde avec Jonathan Sachs Lotus Development Corporation en 1982.

Au début des année 80, personne ne croit au projet PLATO Notes, qui peine à recevoir le moindre financement.

Ensemble, Mitch Kapor et Ray Ozzie vont repenser le système. Forts de leurs talents réunis, ils décident de mettre en chantier le développement de Lotus Notes vers la fin de l’année 1984.

Dans cet objectif, le 7 décembre 1984, Ray Ozzie fonde IRIS Associates, une société spécialisée dans le développement logiciel. La jeune société est financée par Lotus Development Corporation, en échange des droits de commercialisation du futur logiciel dont le nom de code est « Notes ». A l’époque, Lotus est essentiellement connue pour son tableur, Lotus 1-2-3, dont l’origine remonte à 1983.

Pour son 5ème anniversaire, le 7 décembre 1989 Iris Associates mets Lotus Notes sur le marché.

Lotus Notes Version 1.0

Décembre 1989

Lotus Notes Version 1.0

La première version de Notes inclut de nombreuses fonctionnalités largement utilisées actuellement mais qui sont totalement inédites à l’époque, tels que : un système complet de messagerie, la possibilité de réaliser des discussions en ligne, un carnet d’adresses et un système de gestion de documents, la possibilité de personnaliser des modèles avec le langage de macro @Command, le chiffrement des données avec une cryptographie RSA, les DocLinks qui permettent de lier des éléments à la manière d’URL, la réplication (sélective si besoin) des bases de données à partir d’un système d’administration central.

Etrangement, les fondateurs présentent le produit comme un « Gestionnaire d’Informations Personnelles » (Personnel Information Manager – PIM), une sorte d’organiseur avec des fonctions avancées

de communication et de partage d’information. Ils se heurtent par ailleurs à plusieurs problèmes. Tout d’abord les performances des réseaux sont relativement faibles. Ensuite les systèmes d’exploitation des PC sont relativement jeunes et en constante évolution. Lotus Notes V1 fonctionne sous MS DOS 3.1 et OS/2. Un serveur Notes est capable de relier jusqu’à 25 clients. IRIS doit déployer de nombreux efforts pour garantir le bon fonctionnement de son jeune produit.

Au fur et à mesure que les performances des réseaux augmentent, Lotus met en avant ses atouts de produit communiquant. Notes devient un produit capable de relier des groupes de travail et d’optimiser les échanges collaboratifs. Le terme de Groupware apparaît et représente parfaitement le produit.

Lotus Notes 1.1

La nouvelle release de Lotus Notes comporte essentiellement des améliorations issue d’une revue complète et d’une amélioration du code. Le produit est en outre porté sous Windows 3.0.

Lotus Notes 2.0

1991

La version 2 du produit marque un changement de positionnement. Alors qu’il n’était possible que de relier un nombre restreint de postes clients au serveur, cette version apporte le nombre (théorique) de 10 000 postes clients supportés. Le produit est maintenant adressé à de grandes entreprises, qui sont capables d’investir des sommes importantes et de véritablement mettre en valeur les qualités du produit.

Les fonctionnalités existantes sont améliorées et d’autres toutes nouvelles apparaissent, essentiellement : l’ajout du texte riche, la capacité d’envoyer des documents directement par messagerie, les API C permettant de développer des extensions ou de se raccorder à d’autres systèmes.

Les chiffres de vente progressent lentement mais sûrement, et le pôle de développeurs se stabilise à 12 personnes à plein temps.

Lotus Notes 3.0

Mai 1993

Lorsque Lotus sort sa version 3, déjà près de 2 000 entreprises l’utilisent, ce qui représente environ 500 000 utilisateurs. L’équipe de développement a été portée à 25 personnes et la stratégie commerciale vise l’augmentation des parts de marché. Les prix sont revus à la baisse pour rendre le logiciel plus accessible.

En 1994 IRIS ASSOCIATES est racheté par Lotus, ce qui n’a pas fondamentalement changé les caractéristiques du produit.

Les principales fonctionnalités sont l’intégration d’un moteur de recherche plein texte, la réplication sélective capable de fonctionner en tache de fond, la comptabilité avec les réseaux AppleTalk, le support de clients Macintosh, un serveur fonctionnant sous Windows.

En mai 1995 sort InterNotes News (Web Publisher), un logiciel permettant de traduire des écrans Lotus Notes en HTML (statique) et donc de publier du contenu dynamique de manière asynchrone.

En juillet 1995, IBM rachète Lotus dans l’objectif d’acquérir la technologie Notes. L’équipe de développement accède alors non seulement à d’importants moyens financier mais également à de nouvelles technologies maitrisées par IBM ou encore à une puissante force commerciale. Pour l’occasion, l’entité Lotus Development Corparation change de nom pour devenir Lotus Software. Cependant, le développement pour aboutir à la prochaine version sont longs, d’autant plus que le produit est décliné en deux gammes : le client « Designer », comportant toutes les fonctionnalités permettant de construire des applications, et le client « utilisateur », moins cher mais avec des fonctionnalités très réduites.

Pour ne pas se laisser rattraper par la concurrence qui s’organise, le produit va progresser au travers de 2 versions : la 4.0 et la 4.5.

Lotus Notes 4.0

Janvier 1996

La version 4 est une version majeure car elle présente une toute nouvelle interface qui restera utilisée (ou du moins utilisable) jusqu’à la dernière version. Les commentaires des clients ont été largement écoutés pour aboutir à cette interface qui fut ovationnée lors de sa présentation au Lotus Sphère.

Notes 4 est également beaucoup plus rapide et capable de fonctionner sur des systèmes multiprocesseurs. Le prix est réduit de moitié pour conquérir de nouvelles parts de marché.

Le Web est déjà en ligne de mire, alors même qu’Internet n’a encore que peu d’importance pour la majorité des personnes. Notes V4 intègre une fonctionnalité permettant aux serveurs de récupérer des pages sur Internet et de les restituer aux utilisateurs via leurs clients.

Mieux, un add-on nommé InterNotes Web Publisher permet de traduire de manière automatique, bien qu’asynchrone, des écrans Lotus Notes en HTML. Ce produit est révolutionnaire. Pour donner un exemple de fonctionnement, imaginons un forum :

chaque contributeur réalise son ajout qui peut être lu en temps réel par les autres utilisateurs via leurs clients Notes. Régulièrement, InterNotes Web Publisher est lancé et va traduire les nouvelles pages en HTML. Ces pages sont ensuite copiées sur un serveur http et deviennent accessible, automatiquement, via un navigateur Internet. A ce moment, aucun autre système ne permet la publication automatique, et encore moins dynamique, de pages web. Cet Addon deviendra dans une nouvelle version Lotus Domino 1.0, capable cette fois, tant bien que mal, de réaliser des traductions dynamiques de pages.

La version 4 apporte également le langage de programmation LotusScript, une toute nouvelle interface d’administration, une réplication optimisée, un nouvel environnement de développement, la capacité de faire des recherches dans des bases sans les indexer, la sécurisation des bases sur le serveur mais aussi sur le client, une granularité des droits d’accès allant de la base jusqu’au document, le support de http et de Notes RPC (Remote Procedure Call).

Lotus Notes 4.5

Décembre 1996

Peu de temps entre la version 4 et la version 4.5 et pourtant de grandes modifications sont apportées. Tout d’abord les noms changent : le serveur Notes s’appelle dorénavant le serveur « Domino Powered by Notes » et est capable de présenter de manière dynamique les pages à la fois aux clients Lotus Notes et aux navigateurs Internet.

Lotus Notes 4.5 est devenu un outil de développement très puissant qui bénéficie en plus d’un atout de taille : son mécanisme de réplication devenu extrêmement efficace. Il permet à deux entités, clients ou serveurs, de se synchroniser dans les deux sens. Dans une architecture en étoile, il suffit de configurer un serveur pivot pour mettre à jour très simplement un grand nombre de serveurs. Ce mécanisme est également remarquable du fait que seules les données, et non la structure, sont répliquées. De ce fait, les synchronisations sont particulièrement légères. Ce fonctionnement est un réel atout à une époque où non seulement les

débits sont très faibles mais ils ne sont pas continus car très chers. Ils utilisent les lignes téléphoniques à la manière des fax : le serveur et le client utilisent un modem pour composer un numéro, établir une connexion et lancer la réplication avant de raccrocher.

La version 4.5 apporte de nombreuses nouveautés. Les protocoles Internet les plus usuels sont supportés : http bien sûr, mais aussi SMTP et POP3. Le client Notes devient lui-même capable de naviguer sur Internet et même d’exécuter quelques applet Java et supporte nativement Java 1.1. Les serveurs peuvent fonctionner nativement en cluster, les annuaires (alors alors appelés « Carnets d’adresses ») peuvent être regroupés par un mécanisme appelé « assistance d’annuaires », la sécurité est encore renforcée avec entre autres l’expiration des mots de passe, le langage LotusScript devient bien plus puissant avec de nombreux ajouts, le masquage de champs en fonction du client (Notes ou Web) devient possible.

WebSphere 1.0

Juin 1998

En juin 1998, IBM introduit en parallèle la première version de son produit basé sur Java : WebSphere. Il s’agit en réalité d’un moteur de servlet, qui évolue progressivement pour devenir un serveur d’application. Au printemps 2009, WebSphere s’inscrit directement en concurrence de Lotus Notes.

Lorsque Lotus Notes 5 sort en version béta, il comporte lui-même un véritable moteur Java, quasiment à l’égal de celui de WebSphere. IBM supprimera cette fonctionnalité dans la version finale pour des raisons purement stratégiques, comme nous le verrons.

Lotus Notes 5.0

1999

La version 5 de Lotus Notes est une version majeure qui aura marqué l’histoire du produit pour plusieurs raisons, positives bien sûr car les fonctionnalités apportées sont énormes, mais négatives également car les migrations de version furent parfois délicates.
Le positif tout d’abord : il s’agit d’une version qui s’oriente définitivement vers Internet : tout est fait pour fonctionner parfaitement à la fois avec un client Internet et un client Notes, appelés respectivement « client léger » et « client lourd » (qui deviendra le « Client riche », terme plus vendeur).

Les clients riches sont désormais spécialisés et au nombre de 3 : Lotus Domino Designer, Lotus Domino Administration et Lotus Notes. Les fonctionnalités sont très largement enrichies, à tel point qu’il devient difficile de les lister. Le produit comporte nativement sa base de donnée, son moteur de recherche, son système de messagerie, son environnement de développement, son interface d’administration, son annuaire, son moteur HTTP… Lotus Notes est ultra complet.

Il faut resituer le produit dans son époque : Internet en est encore à ses débuts. Les sites sont de plus en plus nombreux mais les applications Web restent peu nombreuses. Lotus Notes 5 permet de développer rapidement une application Web entièrement fonctionnelle, sécurisée, performante et capable de s’interconnecter avec un éventuel back-office. Faire la même chose avec d’autres technologies est soit impossible, soit soumis à 10 fois plus d’efforts et d’investissements.

Le négatif ensuite : la rétrocompatibilité. Une des forces du produit, que nous n’avons pas encore évoquée, est sa rétrocompatibilité à toute épreuve. Vous migrez votre environnement de la version 1 à la 2, puis à la 3, la 4 ou la 4.5 : tout fonctionne parfaitement, voire mieux.

Lotus Notes 5.0

Dans toutes les autres technologies, migration signifie refonte des développements. Pas avec Lotus. Hélas, avec la version 5, c’est la douche froide : après avoir migré, confiants comme à l’accoutumée, les effets de bord sont nombreux et les développeurs doivent revoir d’urgence leurs applications pour les remettre en marche. Mal testé ? Sorti trop vite ? Nombreux sont les clients qui, après avoir vécu le traumatisme de la migration V5 n’ont plus jamais changé de version. C’est la raison pour laquelle, aujourd’hui encore, de nombreux systèmes sont dans cette version alors même que les migrations suivantes se sont toujours déroulées sans problème.

La version 5 bénéficiera de mises à jour nombreuses et régulières, ce qui explique aussi sa longue durée de vie. En moyenne, on comptera une release tous les trimestres, ce qui est un rythme plutôt soutenu. Chaque mise à jour apporte des corrections mais aussi de nouvelles fonctionnalités. Les migrations de release sont simples et se déroulent généralement sans problème.

Notes Vs WebSphere Vs SharePoint

Dès 1999, IBM va tenter d’imposer WebSphere. Un marketing important est mis en place pour capter de nouveau client, mais pas seulement : IBM va tenter de convaincre les utilisateurs de systèmes Lotus qu’ils ont tout à gagner à passer sur WebSphere. La raison est simple : les licences WebSphere sont vendues près de 20 fois plus cher que les licences Lotus. Le problème est qu’il faut également des machines extrêmement puissantes, hors de prix, alors que le plus simple des PC fait parfaitement tourner un serveur Lotus. Il faut ajouter un moteur http, une base de donnée (DB2), un système de messagerie et tout un tas de composants complémentaires pour obtenir un environnement suffisant. Cher, complexe, peu performant : WebSphere a du mal à convaincre, mais il est la priorité d’IBM.

En 2000, IBM va jusqu’à fermer son site « lotus.fr », pourtant le point de ralliement de la communauté française sur le produit. Le nom de domaine est même laissé à l’abandon. Un signe qui ne trompe pas sur la stratégie commerciale et la place du produit chez IBM. Les partenaires commencent à se méfier, d’autant que la complexification progressive du produit opère une sélection naturelle parmi les spécialistes.

Dans le même temps, Microsoft avance sur de nouveaux produits regroupés autour du

concept « SharePoint ». A ce moment, la production chez Microsoft est extrêmement dynamique. SIKIA, également partenaire Microsoft, voit les produits défiler à une vitesse folle. Une vitesse telle que même en interne les équipes de l’éditeur ne savent pas toujours si un produit est déjà sorti ou pas et à quel prix il peut être proposé à des clients qui les demandent déjà ! Par ailleurs, l’éditeur avait largement insisté sur la vente de licence, aux dépends des intégrateurs. Lorsque sortent les nombreux nouveaux produits : très peu de personnes sont capables de les intégrer. Les clients se plaignent : « ça ne marche pas !? ». Si, ça marche : il faut juste savoir comment.

Microsoft décide alors d’aller chercher les spécialistes là où ils sont : du côté des intégrateurs de solutions Lotus. Quand Microsoft met la machine en fonctionnement, ce n’est pas à moitié. C’est un véritable tapis rouge qui est déployé pour les nouveaux partenaires qui sont ravis de pouvoir avancer sur les nouveaux produits de la marque. SIKIA commencera d’ailleurs à travailler sur SharePoint dès ce moment.

Mais revenons à Lotus : alors que le produit est seul et donc leader sur son segment, il est grignoté en interne par IBM et attaqué à l’artillerie lourde par Microsoft. Les temps vont forcément devenir plus durs.

Lotus Notes 6.0

Octobre 2002

A la sortie de Lotus Notes 5 l’économie est incroyablement dynamique, surtout dans l’informatique. Tout le monde est devenu informaticien, des chimistes aux agrégés d’histoire : tout le monde se reconverti et il y a de la place pour tous. Entre Internet qui affole les marchés et le passage à l’an 2000, c’est une folie légère qui s’est emparé des esprits. A la sortie de Lotus Notes 6 l’ambiance est tout autre. La « bulle Internet » a explosé, et les Etats-Unis, au lendemain des attentats du World Trade Center, ont déclenché la « Guerre mondiale contre le terrorisme » et Lotus n’est plus seul sur son marché.

Dans ce contexte économique morose, WebSphere peine cependant à remplacer Lotus Notes et la version 6 apparaît même avec un tarif à la baisse : plus puissant, moins cher. L’ergonomie est légèrement revue, des fonctions avancées de gestion de calendrier sont ajoutées et des éléments supplémentaires sont apportés aux développeurs, tels que les feuilles de style ou les ressources partagées. Lotus Notes permet maintenant de développer des applications très complexes et de de gérer des milliers d’utilisateurs.

Il est également possible de réaliser des interfaces graphiques très soignées. Cependant, pour la majorité des clients, le design est une simple option, souvent trop chère et non prioritaire. Les applications sont utilisées via le client Notes et leur « webisation » est encore rare. Les développeurs ne soignent pas toujours leurs interfaces, et l’outil est qualifié de peu ergonomique ou peu convivial. Les menus de Lotus Notes respectent en effet leur propre logique et non celle de Windows, qui est pourtant imparable et s’affirme en tant que référence.

Nous allons cesser d’énumérer les nouveautés apportées pas les nouvelles versions, tant elles sont devenues nombreuses : cela n’est pas l’objet de cet article. Ce qu’il faut comprendre cependant, c’est que la puissance du produit est à un très haut niveau. Mécaniquement, plus le produit s’enrichit, plus il est compliqué à maitriser dans son ensemble. Des spécialistes apparaissent au sein de la spécialité Lotus : architectes, administrateurs, développeurs, sans parler des produits complémentaires, ce que l’on appelle la « Lotus Family » et qui s’appuient sur le moteur du serveur Lotus, tels que Sametime, QuickPlace, Domino Document, Lotus Enterprise Integrator, etc.

Malgré les succès, la communication autour du produit reste trop faible. La plupart des personnes, même celles qui l’utilisent au quotidien, pense que Lotus est un simple outil de messagerie. Certaines entreprises possèdent une architecture Lotus sans même savoir tout ce qu’ils peuvent faire avec, allant parfois jusqu’à acheter des produits complémentaires pour rien.

Lotus n’est pas non plus un outil que l’on apprend à l’école : il est totalement absent des programmes. Les jeunes diplômés ne le connaissent pas, ils l’apprennent en entreprise. Les spécialistes sont donc rares, et le produit a du mal à sortir de son marché de niche.

Les concurrents profitent de ce manque de communication et s’en donnent à cœur joie. Des comparatifs complètement farfelus apparaissent, qui expliquent par exemple que la messagerie Lotus ne supporte pas les pièces jointes alors que leur produit, lui, les gère parfaitement ! Une aberration totale évidemment, mais qu’IBM ne prend pas le soin de démentir.

Lotus Notes 6.5

Septembre 2003

Lotus Notes 6.5 apporte dans son lot de nouveautés l’intégration d’un module dédié à la messagerie instantanée (Chat). Il est donc maintenant possible au client Notes de se connecter nativement à un serveur Sametime ; à condition d’en avoir mis un en place, bien sûr, en complément du serveur Domino usuel. Les fonctionnalités offertes restent limitées cependant, avec bien moins de fonctionnalités qu’un client Sametime à part entière.

La messagerie Web, anciennement incotés Web Access, est renommée Domino Web Access (pour se caler sur le concurrent et son Outlook Web Access ?). Il est de plus en plus proche du client riche, avec presque autant de fonctionnalités. Un système de drapeaux est mis en place, des règles de gestion du courrier indésirable sont proposées.

Le calendriers et outils de planification sont améliorés pour donner une meilleure expérience de travail en groupe. Des fonctionnalités avancées et une meilleure intégration avec le système d’exploitation (glissé-déposé de pièces jointes par exemple) sont fournies.

Les développeurs voient apparaître Lotus Domino Toolkit pour WebSphere Studio, sous forme de plug-in pour Eclipse, ainsi que des classes Java / CORBA natives. Les administrateurs découvrent de nouveaux outils statistiques leur permettant une supervision plus fine de leurs serveurs.

Le serveur est maintenant certifié sur Windows 2003 Server et prend en charge les nouveaux navigateurs Mozilla, utilisés par les utilisateurs de systèmes Linux.

Lotus Notes 6.5

La communication autour du produit fait toujours défaut. Des comparatifs continuent à profiter de cette lacune : il n’est pas rare d’entendre des clients nous dire « je viens de voir la présentation de la prochaine version de la suite X : elle est bien plus performante que notre suite Lotus ! ». Oui, Monsieur le client, seulement voilà : vous comparez la présentation marketing d’un produit qui n’est pas encore sorti à votre environnement Lotus qui est encore en V5 et qui va fêter ses 6 ans. Le tout pour 10 fois plus cher ! Du marketing, nous voulons du marketing autour des produits Lotus, nous ne voulons pas entendre ce genre de chose. Hélas : rien. Les partenaires ont l’impression de porter seuls le produit : leur nombre diminue de mois en mois et un produit qui perd ses intégrateurs est un produit en danger.

Lotus Notes 7.0

Août 2005

Lotus Notes 7.0

La version 7 apporte des nouveautés importantes au niveau du serveur (et mécaniquement au niveau du client d’administration). Le rapprochement avec WebSphere se poursuit, avec une intégration renforcée avec les plateformes WAS (WebSphere Application Server).

Les données, habituellement stockées au sein du serveur lui-même dans une technologie propriétaire (on parle communément de « base de documents » plutôt de que base de données dans le monde Lotus) peuvent maintenant être directement dirigées vers le SGBD de l’éditeur : DB2. Il ne sera donc plus possible de dire que Lotus ne possède pas son SGBDR. Les développeurs doivent ajouter la maitrise su SQL à leur CV, rien de bien compliqué dans l’absolu. Revers de la médaille que certains découvriront à leurs dépens : il n’est pas possible de migrer un serveur fonctionnant nativement avec DB2.

Il faut donc couper le lien avec le SGBDR pour rapatrier les données dans une structures Domino classique avant de tout rebasculer sur DB2, après migration. Le tout pour un gain fonctionnel anecdotique. Autant dire que ce type d’architecture n’a pas été plébiscitée par les spécialistes.

Les fonctionnalités d’équilibrage de charge (cluster) sont largement améliorées, avec une meilleure répartition (plus « intelligente ») et une supervision encore plus précise. Il n’est en effet pas rare de voir des architectures intégrer de nombreux serveurs, ce qui justifie la fonctionnalité.

La sécurité est renforcée avec la prise en charge des chiffrements de type RSA 1024 bits, même si la sécurité des systèmes Domino a rarement été mise à défaut. Les capacités à mettre en place un mot de passe unique (Single Sign On ou SSO) sont renforcées. Les clients aprécient car trop de mots de passe les agacent : ils en veulent un seul pour tous leurs systèmes. Nous avons chez SIKIA de beaux souvenirs de mise en place d’architectures SSO, dont certaines nous ont fait passer quelques nuits blanches. Nous sommes aujourd’hui habitués à utiliser des dizaines de mots de passe, après avoir dépensé tant d’énergie à essayer d’en avoir quelques-uns de moins à saisir.

Du côté de la messagerie quelques nouvelles fonctionnalités apparaissent mais, en réalité, on commence à avoir fait le tour du sujet : il n’y a plus grand chose à inventer.

Lotus Notes 8.0

Août 2007

La version 8 de Lotus Notes est une version majeure du produit, pour ne pas dire un tournant. Entièrement réécrit sur la base du Framework Eclipse, il bascule dans un nouveau monde : celui de Java.

Quasiment tout est nouveau : le moteur bien sûr, mais aussi les ergonomies, les menus, le « vocabulaire » usuel avec les noms de nombreux éléments qui changent… Bref, cette version est un gros changement.

Nous ne nous attarderons pas sur la lourdeur de la nouvelle version : ouvrir un client Lotus écrit en Java demande un peu (beaucoup ?) plus de temps que d’habitude. Il reste possible cependant, pour les plus réfractaires, d’ouvrir le client en mode classique, allégé de sa couche Java, moyennant quelques pertes de fonctionnalité.

Le monde Lotus est un monde à part, et le monde Java est un peu son frère ennemi. Un peu comme si on voulait faire converger les mondes Linux et Microsoft. Les uns n’ont pas forcément les mêmes convictions que les autres. La recette a forcément du mal à prendre. Quelques développeurs, par curiosité, vont commencer à coder leurs agents en Java. L’apport est relativement faible et, forcément, cela complexifie les applications. Le développeur Lotus doit maintenant ajouter Java à son CV.

Avec cette version 8, IBM annonce (comme la plupart des éditeurs à chaque version) une augmentation des performances.

Les architectes ironisent un peu : à force de recevoir des nouvelles versions toujours 2 fois plus rapides que les précédentes, on va finir par avoir des performances démesurées ! Difficile pourtant, avec ce nouveau moteur Java, de constater le phénomène.

La version 8 est cependant un très beau produit, très complet, qui demande de grandes compétences pour le maitriser. Les vrais experts ne sont pas nombreux, tant le nombre de notions à assimiler sont importantes. Ceux qui ont commencé sur les versions précédentes et qui cumulent 3 ou 5 ans d’expérience prennent le virage ; ceux qui apprennent Lotus sur la V8 se cantonnent généralement simplement à quelques aspects du produit. Cette complexité, cumulée à une absence de publicité et de communication en général, rend difficile la formation de nouveaux spécialistes sur le produit.

Du côté de la messagerie quelques nouvelles fonctionnalités apparaissent mais, en réalité, on commence à avoir fait le tour du sujet : il n’y a plus grand chose à inventer.

Notons également que Lotus Notes V8 est livré avec Lotus Symphonie et intègre pleinement OpenOffice (dans sa version 2.0). Lotus Symphonie est une suite bureautique composée d’un tableur (Spreadsheets), d’un traitement de texte (Documents) et d’un logiciel permettant de faire des présentations (Presentations). Ces produits gratuits, installables indépendemment de Notes, se positionnent face à Excel, Word et PowerPoint.

Lotus Notes 8.5

Décembre 2008

La version 8.5 de Lotus Notes est un aboutissement. La 8.5.1, plus exactement. Cette dernière va en effet introduire une toute nouvelle technologie, qu’IBM essaie de promouvoir depuis longtemps sur des produits qui n’ont jamais vraiment trouvé de clientèle : les XPages. Les promesses sont belles, les clients en attendent beaucoup. Pour le monde Lotus, pourtant, ce sera un véritable choc.

Les Xpages sont, à l’image du nouveau Lotus Notes, profondément ancrées dans l’environnement Java. Seulement voilà, comme nous l’évoquions plus en amont, les développeurs Lotus sont rarement des experts Java et les développeurs Java ne connaissent réciproquement pas Lotus. Passer d’un monde à l’autre est très complexe, et maitriser l’ensemble n’est permis qu’aux plus passionnés. Les documentations sont rares, les forums d’entraide tout autant. Lotus Notes, dont l’atout était sa capacité à développer rapidement des applications performantes, est devenu un outil ultra-complexe et lourd. Les développements qui étaient un plaisir deviennent peu à peu des casse-têtes.

On entend un peu partout : « XPages, ça ne marche pas ». Pourtant si, ça marche. SIKIA n’hésite d’ailleurs pas à refondre tout son CRM sur les technologies Xpages avec une mise en production au 1er janvier 2009 : un système qui durera de longues années et se révèlera tout aussi efficace que robuste. Xpages, donc, ça marche. Le problème, c’est que c’est très complexe.

Avec les XPages : finis, les développements rapides ; finies, les migrations de version sans effet de bord. Tout est devenu différent. Plus de possibilités, plus de puissance, mais plus de complexité.

Bien sûr, il est toujours possible de réaliser des développements classiques, avec les technologies habituelles, heureusement. La majorité des clients restent sur des valeurs sûres, avec de très bons fonctionnements.

Il faut cependant franchir le pas. Les développeurs Lotus se forment à Java, pas facile, et on tente de former des spécialistes Java à l’environnement Lotus (qui a dit « impossible » ?).

Lotus Notes 8.5

Le mélange ne prend pas, les deux mondes sont trop hétérogènes et maitriser deux environnement aussi complexes demande bien trop d’efforts, pour ne pas dire une capacité hors du commun. Je n’hésite pas à le dire : les XPages ont été la dernière charge qui a tué un Lotus déjà bien affaibli.

La 8.5 sera suivie jusqu’à la version 8.5.3 sortie en avril 2013 puis une version finale numérotée 8.5.3 FP4 en décembre 2013.

La durée de vie de cette version est relativement longue, trop même puisqu’il faudra attendre plus de 4 ans pour voir pointer une suite. Même si au final pas grand chose ne manque à la version 8.5, une roadmap claire et un ensemble de perspectives auraient rassuré quant à l’avenir du produit.

La version 8.5, qui est une très bonne version, arrive en pleine crise des subprimes. Nous aurions pu imaginer un positionnement face à des architectures WebSphere ou SharePoint pour répondre aux mêmes besoins avec un budget moindre. Un frémissement de la part d’IBM a pu laisser penser un temps que le produit allait être relancé, mais le sursaut resta de courte durée.

Nombreux sont les clients qui basculent vers Microsoft. Ces derniers n’hésitent pas à offrir des accompagnements complets et un an de licences gratuites à ceux qui migreront vers leurs solutions, ce qui représente parfois des sommes très importantes. En face, IBM n’est pas prêt à lacher grand chose, refusant même de consentir quelques pourcentages de rédution sur ses produits mis en danger. Sur le terrain, les partenaires sont désarmés et les clients migrent en masse.

IBM Notes 9

Mars 2013

IBM Notes 9

La version 9 de Lotus est une version améliorée de la version 8. Les performances sont (réellement) meilleures, l’intégration avec les composants sociaux sont renforcés et la prise en charge des appareils mobiles est rendue meilleure, surtout lorsque le produit est accompagné de IBM Notes Traveler. Un virage marketing a été pris. Le véritable nom de cette version est IBM Notes 9.0 Social Edition. Le mot « Lotus », si cher à la communauté, a finalement disparu : la marque a été abandonnée. Le produit est proposé sans vraie campagne de communication, même si le marché potentiel reste important du fait des nombreuses possibilités d’un produit toujours actuel.

Le client Notes est devenu aussi un client WebSphere, de nombreuses petites évolutions apparaissent, sans pour autant révolutionner le produit. La migration n’est pas forcément inévitable, quelques clients se lancent. L’opération se réalise sans problème.

Les utilisateurs trouvent sur leur client Notes une nouvelle ergonomie avec une page « découvrir » et une nouvelle page d’accueil, qui les aident à s’orienter dans les très nombreuses fonctionnalités du produit. La différence entre client léger et client riche s’est encore atténuée : l’outil est pensé pour une utilisation essentiellement Web.

De nombreuses nouveautés sont présentes, bien sûr, dans cette nouvelle version qui ne verra venir qu’une seule release et quelques Fix Packs. Il s’agit essentiellement pour l’utilisateur de compléments de paramétrages, de quelques menus affinés, mais derrière un nouvel habillage se trouve des fonctionnements bien connus. Lorsque cette version est mise en vente, la communauté Lotus en France est devenue relativement confidentielle.

Fin du support de Lotus 1-2-3

30 septembre 2014

Fin du support de Lotus 1-2-3

N’oublions pas qu’avant Notes, Lotus vendait sont tableur révolutionnaire Lotus 1-2-3, qui a mécaniquement été récupéré par IBM lors du rachat de la société. Lancé en 1983, date à laquelle il est révolutionnaire et sans concurrence, le produit aura eu une belle carrière mais n’aura pas supporté l’écrasante domination de Microsoft Excel.

Fin du support de Lotus 1-2-3

IBM a stoppé le support du produit le 30 septembre 2014, soit 31 ans après la sortie de sa première version. Les suites impliquée dans l’arrêt du support, à savoir IBM Lotus 1-2-3 Millennium, IBM Lotus Smart Suite (IBM Lotus SuperOffice au Japon) et IBM Lotus Organizer sont à cette date retirées du marché.

IBM Notes 9.0.1

Janvier 2015, dernière version du produit

La 9.0.1 sort le 29 octobre 2013. Elle est essentiellement une version apportant des corrections de bugs à la V9. Les 7 Fix Packs consécutifs en feront de même, avec des sorties respectives les 16 avril 2014 (FP1), 20 août 2014 (FP2), 21 janvier 2015 (FP3), 17 Juin 2015 (FP4), 30 Novembre 2015 (FP5), 6 mai 2016 (FP6), 13 septembre 2016 (FP7). A la date de sortie de la version 9.0.1, IBM annonce que le produit est, définitivement, dans sa dernière version. Le support du produit par l’éditeur est prévu jusqu’en 2022.

IBM Verse

2 avril 2015

IBM Verse

Début 2015 IBM annonce sa nouvelle solution de messagerie révolutionnaire : IBM Verse. Verse a pour objectif d’être votre assistant personnel : il vous résume votre programme de la journée et vous aide à l’organiser. Sommes-nous finalement vraiment loin des objectifs de Lotus Notes 1.0, qui en 1989 est présenté comme un « Gestionnaire d’Informations Personnelles » ?

D’abord annoncé sous forme de Freemium, il est ensuite inclus dans la solution globale de Cloud d’IBM. Aujourd’hui, son positionnement est relativement confus et il est difficile de savoir si sa roadmap annoncée jusqu’en 2019 est bien suivie.

IBM Verse est le composant messagerie d’IBM Connections Cloud, solution globale dédiée au « Social Business ». Il a été développé en version Web, basé sur une architecture HTML5. Il peut être un client du serveur Domino, comme Notes. Il existe en version mobile, sous forme d’application pour iPhone ou Androïd par exemple. Il remplace l’ancienne application nommée « IBM Notes Traveler ». Lorsqu’il est utilisé en environnement mobile, Verse est pris en charge par Domino via son composant IBM Traveler. Verse derrière un serveur Domino ne présente cependant pas autant de fonctionnalités que lorsqu’il est connecté sous licence IBM Connections Cloud.

IBM Connections Cloud

Actuellement

IBM Connections Cloud

La solution Cloud d’IBM est une alternative à Office 365 de Microsoft. Elle apporte un ensemble de fonctionnalités que l’utilisateur peut utiliser, moyennement abonnement, à la demande.

L’offre est bien sûr basée sur l’architecture IBM Cloud. Elle a été présentée sous le nom de Lotus Live, devenu IBM SmartCloud for Social Business, puis IBM SmartCloud Connections, puis est devenue IBM Connections Social Cloud, puis IBM Connections Cloud ou même, tout simplement, IBM Connections. Les équipes techniques et les infrastructures n’ayant pas toujours la capacité à être aussi

réactives que le marketing, l’ensemble de ses dénominations se retrouve dans un joyeux mélange au sein du produit : on ne sera pas étonné de s’inscrire sur Connections Cloud, de recevoir un mail de la part de SmartCloud avant de se connecter sur un serveur Notes Traveler.

L’ergonomie du client HTML est très sobre, celle de l’application mobile est un peu plus colorée, sans pour autant donner dans l’extravagant. Nous aimerions peut-être davantage d’audace dans les interfaces, qui ne sont pas personnalisables dans le Cloud comme elles peuvent l’être le couple Domino/Notes.

Lotus en chiffres (1/2)

Des millions d’utilisateurs

En décembre 2004, 20 ans après la création d’IRIS, Notes est utilisé par 110 millions de personnes à travers le monde. En 2008, le Gartner Group estime le nombre d’utilisateurs à 140 millions. En 2009, la solution collaborative de Lotus est utilisée par plus de 180 millions de personnes. En 2012, IBM recense 280 000 développeurs Lotus sur son centre de ressources DeveloperWorks.

A la fin des années 1990, Lotus Notes représente 50% des parts de marché contre 25% pour Microsoft. En 2006, le rapport est de 41% / 51%. En 2009, Lotus représente environ 40% des parts de marché contre environ 50% pour Microsoft.

Lotus en chiffres (2/2)

Des milliards de dollars

Pour rappel pour ceux qui sont passés trop vite sur le début de cet article, Lotus a été créé petit à petit par des passionnés au début des années 80. Les financements étaient restreints, personne ne croyait au projet. En décembre 1984, IRIS Associates voit le jour, financée par Lotus Development Corporation en échange d’un droit de commercialisation.

En 1994, soit 10 ans plus tard, IRIS est rachetée par Lotus pour 84 millions de dollars. Un an et demi plus tard, en juillet 1995, Lotus est lui-même racheté par IBM pour 3,5 milliards de dollars. Il est estimé que sur ce prix la valorisation de Notes, qui regroupe 2,2 millions d’utilisateurs, représente à elle seule 3 milliards de dollars.

Et après ?

L’héritage

Les produits Lotus ont laissé un important héritage, et ceux qui ont travaillé sur le produit ne se sont bien sûr pas arrêtés là.
Après son expérience au sein de Lotus, le visionnaire Ray Ozzie a fondé Groove Networks. Sa société a été rachetée par Microsoft en 2005. Ray devient alors le principal architecte logiciel de Microsoft. Pour lui, le futur s’appelle le Cloud mais, toujours en avance sur son temps, beaucoup peinent à le suivre. En 2008, il présente Azure, qu’il décrit comme un système d’exploitation basé sur le Cloud. Peu suivi, il quitte Microsoft en octobre 2010.

En 2015, le marché du Cloud a été évalué à 23 milliard de dollars. Amazon détient 31% des parts de marché, Microsoft représente 9%, IBM 7% et Google 4%. Ces 4 acteurs s’octroient ainsi la moitié du marché : nous parlons de volumes énormes. Les perspectives font état d’un marché de 278 milliards de dollars en 2020.

Si IBM a su s’imposer en tant qu’acteur du Cloud en devenant le 3ème acteur mondial, il peine toujours à valoriser ses solutions collaboratives. Il faut avouer que la société jongle avec tant de milliards sur le Cloud que l’on peut comprendre que les solutions logicielles ne sont plus sa priorité. Ce sont souvent les partenaires, tels que SIKIA, qui déploient une énergie importante pour rester positionner sur ces solutions, les faire vivre et accompagner les clients. Nous continuons à maintenir de nombreux systèmes Lotus et à accompagner nos clients sur des solutions toujours très efficaces qui n’ont souvent pas vraiment d’alternative aux mêmes prix. Nous continuerons à le faire aussi longtemps que possible et même si, chez nous aussi, la part de l’entreprise dédiée à ces technologies a depuis longtemps été dépassée par d’autres – non pas que la technologie soit vraiment obsolète, plutôt du fait qu’elle ne soit plus déployée.

Conclusion

Il y aurait encore beaucoup à dire sur Lotus, détailler la « Lotus Family » par exemple, le projet « RAVEN » et « K-Station » ou les autres technologies qui ne furent jamais commercialisées tant l’histoire du produit est riche. Les sources, en revanche, sont rares (celles de l’époque du moins) et il faut puiser dans les vieilles présentations ou documentations que l’on a pu, par chance, conserver. Si vous avez des remarques, des questions ou des compléments à donner à cet article, n’hésitez pas à nous contacter. Si vous avez d’anciennes présentations, prospectus, publicités, Herdbooks ou autres documents intéressants à nous fournir, merci par avance de nous les adresser sur contact-lotus@sikia.fr, elles permettront sans aucun doute d’enrichir cet article.

J’ai personnellement commencé à travailler sur Lotus dès la version 3, peu avant la sortie de la version 4. J’ai eu la chance, grâce à la richesse de ce produit, d’aborder de nombreuses facettes du métier d’informaticien : architecture, conception, développement, mobilité, administration, sécurité, réseau, graphisme, ergonomie, direction de projet, etc. Les expériences ont été passionnantes et riches. 20 ans plus tard beaucoup de choses ont changé, produits, usages et technologies, mais les principes et les bases restent les mêmes. Je souhaite à tous ceux qui débutent leur carrière d’être portés par un produit qui leur apporte autant : pour bien aborder les technologies du futur, connaître leur présent et leur histoire est un formidable atout.

≪ L'histoire de Lotus Notes ≫ par Laurent Bodhaine - SIKIA - Mai 2016